… De toutes les qualités humaines, celle qui m’interpelle, m’ émerveille le plus et pour laquelle j’ ai la plus grande considération – pour ne pas dire une vénération – c’est la bonté, une bonté associée à de l’humilité, mais une bonté qui « ne se laisse pas pour autant marcher sur les pieds » et qui est la marque d’une personne d’une grande dignité et en même temps qui ne se laisse pas circonvenir, abuser… Quoique ces personnes là, aussi bonnes, humbles et dévouées qu’elles sont, lorsqu’ elles sont attaquées, critiquées, déconsidérées, et que l’on profite un peu trop d’ elles, se défendent assez mal…
Demeurant souvent à l’écart dans les réunions familiales et autres, ne se mettant jamais en avant, elles ne sont tout bonnement, parfois, pas invitées (oubliées) lors d’ événements familiaux… Alors même que pour rendre service, par exemple garder de jeunes enfants, ou encore pour leur demander de l’argent, là, elles sont sollicitées et mises à contribution par leurs proches, amis, connaissances…
L’immense bonté de ces personnes parfois aussi, « te rentre dedans » en immobilisant en quelque sorte le temps que tu passes à leur côté, et il y a quelque chose de « cocasse » même dans leur bonté, dans leur manière de t’ accueillir… Et tu ne peux que te sentir bien en leur présence qui te semble intemporelle, immuable…
Le jour où ces personnes disparaissent, quittent cette vie durant laquelle on les as connues, vues et revues… C’est pour ainsi dire plus terrible que de voir brûler une bibliothèque… Quoiqu’ une bibliothèque qui brûle c’ est tout de même dramatique !
Cela dit, nous pensons, nous ressentons, nous jugeons les comportements des uns et des autres, tout ce que nous observons d’eux et dont nous sommes les témoins de ce qu’ils font ou ne font pas … Selon notre vision personnelle des choses et des êtres, selon notre sensibilité, nos valeurs, notre culture, autant dire que nous sommes dans notre peau mais jamais dans la peau des autres, de ce qu’ils ressentent eux, de ce qu’ils vivent…
Alors, à cette heure grave qui est celle du deuil, de la disparition d’une personne d’ une très grande bonté que l’on a aimée et toujours soutenue et considérée ; dans l’assemblée qui réunit proches, amis, connaissances au moment de la cérémonie d’adieu – à l’église ou pas – c’est le silence dans le recueillement qui, en présence et parmi les assistants – proches, amis, connaissances – est de mise, s’impose et rend dérisoire, dédimensionné, tout ce que l’on a pensé des uns et des autres, que l’on a vu, observé, dont on a été témoin…
Ce monde présent où dominent les apparences, l’individualisme, la dureté dans la relation, l’indifférence à ce que sont les êtres dans leur intériorité ; où entre principalement dans les préoccupations des uns et des autres, ce que l’on possède (argent et biens), ce qui nous rend visible aux autres, ce qui nous « place et nous conforte » aux yeux des autres et fait de nous des êtres référents… Ce monde là n’est pas fait, dans sa dureté, impitoyable qu’il est, pour les gens qui sont des rêveurs, des penseurs, des poètes à leur manière, ni pour les gens dont la bonté, dont l’humilité, dont le dévouement aux autres, dont la discrétion, sont les premières qualités…