… « L’approche de la mort terrifie, mais si le nouveau-né avait conscience de l’approche de la vie, il serait tout aussi terrifié »
[ Charlie Chaplin ]
… L’approche de la mort terrifie… Et interroge.
Mais, si nous savons que pour nous, c’est à dire l’être que l’on est avec tout ce que l’on possède – de capacités en soi, de biens matériels ; et avec tout ce que l’on voit, que l’on ressent, que l’on produit, transmet, apprend… Si nous savons que tout ce qui nous concerne s’arrête à notre mort, nous savons aussi que tout ce qui n’est point nous, c’est à dire les autres humains, les choses qui nous entourent, ce qui se dit et se fait, ce qui s’observe, ce qui se produit, se transmet, s’apprend ; que tout cela continue… Tant qu’il y aura des humains, des êtres vivants, en cet endroit de l’univers qui s’appelle La Terre…
En quelque sorte, ce qui continue qui n’est plus nous, c’est peut-être ça la « vie éternelle » et tant que nous sommes nous-mêmes encore vivants, nous le savons et c’est ce savoir là qui contribue, à mon sens bien davantage que ne le fait la Religion, à nous rendre la mort moins terrifiante… Car ne demeure vraiment terrifiant, que le fait de ne plus pouvoir observer, témoigner, ressentir… (C’est en effet, terrifiant, de ne plus pouvoir observer, témoigner, ressentir)…
Mourir, c’est comme être un voyageur sur le quai d’une gare ; un voyageur dont le voyage qu’il fait est le dernier, qui laisse son bagage sur le quai, ce bagage qu’il a porté toute sa vie, et qui monte dans un train dont il ne connaît pas la destination de ce train : dès l’instant où il pose le pied sur la marche d’accès au wagon, il n’a plus conscience de rien…
Et le bagage demeure sur le quai : il sera pris, peut-être ouvert, peut-être vidé d’une partie de son contenu qui servira ; sans doute aussi, déposé quelque part puis détruit, avec tant d’autres bagages abandonnés sur le quai, n’ayant pas même été ouverts…
Le nouveau-né n’a pas conscience de l’approche de la vie mais il est déjà dans « une vie avant la vie » c’est à dire une vie dans l’environnement intérieur du corps de sa mère et, en quelque sorte relié au monde extérieur à travers sa mère qui lui transmet ce qu’elle voit et ressent et dont l’enfant non encore confronté à la vie au dehors est impacté…
Et dès l’instant où le nouveau-né vient à la vie au dehors, s’il n’est pas « consciemment terrifié », il manifeste cependant son effroi par le cri qu’il pousse au moment où l’air pour la première fois entre dans ses poumons (Nous ne nous souvenons pas de ce moment, mais il a certainement été douloureux)…
… Au sujet du suicide (mettre soi-même délibérément, fin à ses jours) :
Se résoudre au suicide, c’est en quelque sorte, accepter (ou concevoir) de ne plus ressentir, de ne plus observer, de ne plus témoigner, de ne plus transmettre, communiquer, apprendre…
Comment une telle acceptation peut-elle être possible ? Comment ce qu’il y a de plus terrifiant – ne plus observer et ne plus témoigner – peut-il être supporté et, avant même de décider de mettre fin à ses jours, envisagé ?
À la limite – à l’extrême limite - « ne plus ressentir » (la souffrance la plus épouvantable, la plus dure qui soit) ça peut rendre concevable – et jusqu’à être souhaitable – le suicide…. Mais envisager, concevoir de ne plus ni observer, ni témoigner… Ça, c’est – à mon sens- totalement impossible ! (un « pas à franchir » que je n’arrive pas à « intégrer dans mon entendement qu’il puisse être franchi)…